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Nationalité : pas de présomption de fraude en cas de transcription du jugement de divorce en marge de l’acte de mariage

Civil - Personnes et famille/patrimoine
27/11/2020
La transcription d’un jugement de divorce en marge de l’acte d’un mariage ou un signalement relatif à un remariage ne sont nullement constitutifs d’indices de fraude.
Un ressortissant marocain ayant contracté un mariage avec une ressortissante française en 2001, a souscrit une déclaration d’acquisition de nationalité en 2002. En 2004, il divorce et se remarie avec sa précédente épouse marocaine dont il avait eu un enfant en 2002. Son divorce est retranscrit sur les actes de l’état civil.
 
En 2010, le ministère de l’Intérieur a informé le ministère de la Justice de son refus d’enregistrer la déclaration d’acquisition de nationalité souscrite par l’épouse du requérant, en raison de la fraude commise par celui-ci. Et le ministère public a engagé en 2012, une action en vue d’obtenir l’annulation de la déclaration de nationalité souscrite en 2002.
 
Il faut rappeler que dans sa rédaction d’origine, issue de la loi du 16 mars 1998 relative à la nationalité, l’article 21-2 du code civil prévoyait qu’un époux étranger pouvait souscrire une déclaration de nationalité, après un an de mariage avec un ressortissant français, si la communauté de vie n’avait pas été rompu et si le conjoint avait conservé sa nationalité française.
 
Par un arrêt du 12 juin 2018, rendu sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Paris a déclaré recevable l’action du ministère public car non prescrite et a demandé l’annulation de l’enregistrement de la déclaration de nationalité française.
 
Le requérant fait grief à la cour d’appel de ne pas avoir tenu compte de la transcription de son divorce dans les actes d’état civil qui emportait connaissance au ministère public, de la rupture de la vie commune de son premier mariage. Il considère que l’action du ministère public est prescrite au motif que le délai biennal prévu par l’article 26-4 du code civil court à compter de la date à partir de laquelle le procureur de la République territorialement compétent a été mis en mesure de découvrir la fraude ou le mensonge. Or, la transcription du divorce dans les actes d’état civil du requérant aurait pu permettre au Procureur d’invoquer une fraude, ce qui n’a pas été le cas. Il ne s’est par ailleurs, pas opposé au remariage du requérant en 2004.
 
Le signalement fait par le service d’état civil portait sur la présence irrégulière sur le territoire français, de l’épouse du requérant, ce qui selon lui ne constituait pas une fraude de nature à invalider l’enregistrement de sa déclaration de nationalité.
 
La Cour de cassation rappelle qu’en application de l’article 26-4 du code civil, l’action du ministère public contestant l’enregistrement d’une déclaration de nationalité, court à compter de la date à partir de laquelle le procureur de la République territorialement compétent, a été mis en mesure de découvrir la fraude ou le mensonge.
 
En outre, la Haute juridiction considère qu’un ressortissant étranger ayant souscrit une déclaration en vue d’acquérir la nationalité française en application de l’article 21-2 du code civil, ne peut se prévaloir de la mention de son jugement de divorce, en marge de son acte de (second) mariage pour en déduire que le ministère public territorialement compétent a été mis en mesure de soulever la fraude. Et ainsi, dire qu’il aurait pu exercer son action en annulation de l’enregistrement de déclaration de nationalité.
 
La Cour de cassation observe que dans son arrêt, la cour d’appel avait relevé la mention du divorce du requérant dans la copie intégrale de l’acte de mariage, avec son épouse française mais qu’il n’en résultait pas pour autant que le requérant avait acquis la nationalité française. Le Procureur de la République avait donc nécessairement besoin de procéder à d’autres investigations, que ces seuls éléments pour suspecter une fraude.
 
S’agissant du signalement relatif à la seconde épouse du requérant, il porte sur le séjour irrégulier de celle-ci sur le territoire français, élément pouvant constituer un obstacle à ce second mariage.
 
En conséquence, la première chambre civile considère d’une part, que «  le ministère public territorialement compétent ne pouvait supposer une fraude au seul vu de la transcription du jugement de divorce en marge de l’acte de mariage, d’autre part, que le signalement relatif au remariage n’était pas, par lui-même, constitutif d’un indice de fraude, la cour d’appel, qui a effectué la première recherche prétendument omise et n’avait pas à procéder à la seconde que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ».
 
Source : Actualités du droit